lundi 10 août 2009

Dimanche 9 août



Sequoia Park

Je me réveille couverte de piqûres d’un insecte non identifié. Balance mes affaires dans la voiture, dis rapidement au revoir au voisin en ne laissant aucune chance à une conversation interminable, m’élance vers le Wal-Mart pour acheter une crème «stop-itch». Qui n’a aucun effet. Faut que je me retienne de gratter, ça risque de mal finir. Monte la 65 jusqu’à ce que les panneaux disent de tourner à droite. Avant d’entrer dans le parc, je marque un arrêt petit-déj dans une maison en bois aux énormes ventilos. Remets de l’essence au cas où. La connexion Internet du motel ayant crashé hier soir, je cherche un wifi spot et en trouve un au Visitor Center de Lemoncove. Je passe le péage de Sequoia Park sur les coups de 13h30, $20, la file de voitures est déjà longue et moi de mauvais poil.

La mini route ondule dans les montagnes, j’aime pas les virages en épingle. On grimpe 1500 mètres en une vingtaine de minutes, l’air devient plus léger, je me souviens du désagrément ressenti à Yellowstone. Sauf que maintenant je suis seule à assurer la conduite. D’un paysage sec et brûlé on entre peu à peu dans la forêt, les pins qui bordent la route sont de plus en plus grands. Et voilà que j’aperçois mon premier Sequoia, incroyable, on en voit même pas la couronne. Me gare à l’entrée de Giant Forest et entame le petit trail autour d’un marécage. La mauvaise humeur laisse place à la fascination devant ces arbres sans fin d’un autre âge. Comme pour les cactus géants d’Arizona, je me demande ce qui a pris à la Nature d’inventer un truc pareil. On est baigné dans des senteurs pour moi inconnues jusque-là. L’air est doux, l’écorce dégage une odeur fine caressant les narines. Je m’en souviendrai. Mais la civilisation se fait vite rappeler par une bande d’Italiens en mode mitraillette aigüe. En accélérant le pas pour m’en défaire, une femme vient vers moi pour me prévenir que des ours noirs ont été repérés à proximité de la piste. Bonne citoyenne, je préviens à mon tour les Ritals qui montent d’une octave. Serait-ce une simple rumeur urbaine pour ajouter un peu de piment ? Non, je verrai effectivement un ourson gambader entre les arbres et faire ses griffes sur un Sequoia. Reviens sur le parking en gardant un œil sur la forêt, pas très à l’aise.



Remonte en voiture et roule jusqu’à l’attraction principale. Le parking construit sur quatre terrasses déverse un flux continu de visiteurs, beaucoup de familles, pas mal de Français. Le chemin pavé qui mène au General Sherman Tree fait à peine un kilomètre mais descend sur près de cent mètres. J’entends aux remarques des enfants traînant les pieds que le plus grand arbre du monde n’est pas loin, alors c’est lequel, c’est celui-là ?. Le Sequoia en question fait 84m de haut et comptabilise près de 1000 ans. Comme il est mort, il ne grandit plus qu’en circonférence. Il vaut le détour, mais les hordes de touristes altèrent quelque peu l’expérience. La mauvaise humeur revient, je remonte la pente au pas de course malgré les panneaux rappelant qu’il faut y aller mollo à cause de l’altitude, termine le tour du parc d'une traite. Ressors par la 180 West et continue jusqu’à Fresno où je déjeune d’une salade plastique. Les Mc Do sont un bon indicateur socioéconomique du quartier, voire de la ville dans laquelle il se trouve. Celui de Fresno laisse deviner des conditions de vie difficiles. Achète un Red Bull dans le Liquor Store d’à côté, les vieux Mexicains qui traînent sur le parking ressemblent à des Hobos. Je quitte cette ville agricole à 17h30, j’en ai encore pour trois heures jusqu’à San Francisco. Appelle rapidement Felitia, rendez-vous à l’aéroport où elle vient chercher sa sœur qui revient de DC.

A la sortie de Fresno je crois voir un panneau indiquant SF, quitte l’autoroute pour m’enfoncer dans des champs à perte de vue. A Los Banos, bien plus tard, les rectangles verts me réconfortent, je suis sur la bonne route. Tourne à droite sur la 5, les voitures et poids lourds sont nombreux en ce dimanche soir. Je vais être à court d’essence mais ne vois aucune station service. Ce serait dommage de terminer le voyage par une panne sèche. Sauvée par le gong à Patterson à l’approche de 20h. En repartant je réalise que la nuit est sur le point de tomber, et moi qui ne conduis jamais de nuit à cause de ma mauvaise vision. Comme pour la conduite en altitude, je sais que j’ai pas le choix alors je serre les dents. Le soleil se couche effectivement, les champs d’éoliennes géantes se dessinent devant le ciel rose criant, c’est magnifique mais j’ai pas droit à l’erreur en essayant de les photographier. C’est déjà assez compliqué de suivre les marquages blancs au sol, mon seul repère. Le rose laisse place au noir, on s’approche des agglomérations, je fixe le serpent de phares rouges, les piqûres sur mes bras et poignées se réveillent, j’allume la radio puis l’éteins, mets l’air conditionné puis l’arrête, pourvu que j’arrive bientôt. Les sorties d’autoroute sont de plus en plus nombreuses, c’est laquelle qu’elle m’avait dit déjà Felitia, si je me trompe ça va être un enfer pour s’y retrouver, ne pas gratter, mes mains sont endolories, va falloir se mettre sur la file de gauche, j’y vois rien dans le rétroviseur avec tous ces phares, ça y est je me suis plantée. Rester confiante, me répète que je conduis dans le noir depuis une heure et que c’est donc possible. Felitia m’avait parlé d’un pont, en voilà un et de l’autre côté y a la 101 que je devais prendre vers le sud. Incroyable, j’ai réussi à y remettre de l’ordre. Mais 20 minutes plus tard je ne vois toujours pas d’indications vers l’aéroport alors je la rappelle. Euhm non, ça fait longtemps que tu aurais dû tourner, ok, reviens en arrière, l’essence va encore manquer mais j’ai pas envie d’en remettre. Le temps me paraît une éternité, ça va se jouer à peu de chose près. San Francisco International Airport se dessine enfin, je trouve le rental car drop-off, désolé le gars qui fait les retours vient de partir. … Ah non regardez, il est encore là, tu peux l’enregistrer ?

J’arrête le moteur et respire profondément. Ca y est c’est bon, mais mes avant-bras sont rouges et gonflés. Je ramasse mes affaires, plus de deux semaines dans cette caisse sont longues à récupérer. Rends les clés, traîne mes sacs jusqu’au Terminal A, m’assois sur le trottoir pour fumer une clope. Un quart d’heure plus tard Felitia arrive, puis Manuella, il est 23h30. On rentre dans San Francisco, buvons une bière dans la cuisine, parlons des sites que j’ai visités. Pas le courage de défaire le canapé-lit alors je m’effondre par terre sur des coussins.

Du mal à croire que le roadtrip soit déjà terminé. Il me reste quatre jours pour découvrir San Francisco avant de revenir à Paris le 15 août au petit matin.

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