jeudi 13 août 2009

Jeudi 13 août


Angel Island

Quand je me lève à 8h30 Felitia est déjà partie à l’école et Manuella propose de me déposer down town. Je préfère commencer par une séance dans la salle de gym repérée dans le quartier, suivie d’un sandwich macrobiotique, puis le N jusqu’à down town. Petites habitudes obligent. Arrive aux docks, le bateau part 30 quais plus loin, ok, longue file d’attente pour acheter un ticket, décide de faire l’excursion même si je n’aurai qu’une heure et demie sur place.

Le ferry traverse la baie sous un ciel bleu impeccable, ça vente pas mal. Arrivée à Angel Island, le Ranger explique que j’arrive trop tard pour la visite guidée et pour le shuttle qui aurait pu m’emmener. M’élance donc à pied, les minutes sont comptées. Mais à l’entrée du chemin 200 mètres plus loin un écriteau rappelle qu’il fallait acheter les tickets plus bas alors je reviens en arrière. N’étant pas seule à avoir relevé le défi, je rattrape un père, sa fille et son copain sur le chemin. Lui est un ancien State Trooper du Texas qui a décidé de refaire une carrière maintenant qu’il est à la retraite alors il est devenu prof de physique. On discute élèves à problèmes. Vingt minutes plus tard et en nage, on atteint notre objectif : The Immigration Station. Je demande à une Ranger si je peux rejoindre la visite guidée à la mi-temps, pas de problèmes, je la suis à travers les pièces racontant l’histoire des migrants d’Asie de la première moitié du siècle, ne peux m’empêcher de lui poser des questions alors elle finit par me faire une visite privée.

Angel Island fait d’abord penser à Ellis Island, île de transit pour les migrants Européens lorsqu’ils arrivaient à Manhattan. Sauf que Angel Island n’a vu passer qu’un million de passagers, un rien comparé aux 12 millions de la côte est. Ce qui s’explique d’une part par le fait que les Chinois, les plus nombreux à vouloir émigrer, en étaient interdits par la Chinese Exclusion Act. Un des nombreux chapitres ambigus de l’histoire du pays. D’autre part, on n’y faisait transiter que ceux dont les papiers n’étaient pas en règle ou présentaient « un problème », personne de mauvaises mœurs, délinquant ou autre forme de terrorisme potentiel. Les murs des baraquements sont couverts d’inscriptions gravés au couteau, maintes fois repassées à la peinture.
Les conservateurs du musée en ont décodé plus d’une centaine. Bon nombre sont des poèmes, d’autres des témoignages de la vie quotidienne et des difficultés rencontrées, d’autres enfin de simples signatures en mandarin, japonais, thaï, hindou, russe. Le centre d’immigration ferme en 1940 pour devenir un haut lieu militaire préparant les interventions dans le Pacifique, puis un centre de rétention de prisonniers de guerre. D’où également quelques commentaires en allemand. Türe Zu !

Ne pouvant me permettre de louper le dernier ferry, je repars vers l’embarcadère au pas de course sous un soleil de plomb. La vue sur la baie est magnifique, l’eau turquoise bordée de palmiers, des voiliers ça et là. Couleur locale, je discute avec les autres passagers. Vous venez d’où, ah oui, et vous êtes en ville pour combien de temps ? On nous fait débarquer au premier arrêt, on repart dans dix minutes. Entre temps un problème mécanique fait apparition, dont on n’est informé que quarante minutes plus tard, à peine agacée je prends un tram. Suis maintenant comme un poisson dans l’eau avec les transports publics et partage le trajet des costards-cravates.
Arrive en bas de California Street, en refais une trentième photo. Papote avec le conducteur du tramway vu tant de fois au cinéma, descends sous terre prendre le N qui me ramène à Golden Gate Heights. Felitia revient de l’école, fatiguée des réunions de rentrée interminables. Faut croire que les déformations et lassitudes professionnelles sont transculturelles.

Alors que la journée avait commencé dans un nuage, le ciel est resté bleu vif depuis midi. Demain lever à 5h pour un premier avion, puis un second à Charlotte, pour arriver, si je ne loupe pas la correspondance, à Paris samedi 15 août à 6h40. Je garderai un bon souvenir de San Francisco. Sans parler de l’émotion ressenti sur les sites visités, le long des paysages parcourus et au contact des gens rencontrés pendant ces trois semaines on the road.

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