jeudi 13 août 2009

Mercredi 12 août




Alcatraz

«Break the rules and you go to prison. Break the prison rules and you go to Alcatraz» (Anonyme)

Réveil à 9h suivi d’un jogging dans le parc. Toujours mal aux pieds. Déjeuner macrobiotique sur la 9ème avenue, tramway N (« N as in Not and Never » – il arrive pas souvent). Descends tout en bas de Market à l’entrée du port, marche jusqu’au Pier 39. J’ai eu la chance de trouver un ticket en ligne, merci Felitia, il faut normalement les réserver une semaine à l’avance en saison haute. Attends dans l’enclos à bétail que notre ferry soit prêt à partir, monte sur le pont supérieur, la traversée ne dure que 15 minutes. En descendant du ferry on est invité à écouter les instructions dispensées par une Ranger à peine sortie du lycée. Interdiction de manger et de fumer sur l’île, seules les bouteilles d’eau sont autorisées. Le dernier bateau repart à 18h10, ne pas le louper. Oui mon Général. On n’est pas à Alcatraz pour rien.



Commence par regarder la vidéo résumant l’histoire de l’île, qui ne se limite pas qu’aux prisonniers et tentatives d’escapade. Gravis la colline et pénètre dans The Rock. Des employés habillés mi-Ranger, mi-gardien distribuent des casques audio. S’avancer jusqu’au premier panneau, allumer la console, ne pas déconner. C’est parti. Le tour guidé individuel est hy-per-bien-fait. Vraiment. Les témoignages de réels anciens gardiens et d’authentiques ex-détenus sont baignés dans un fond sonore plus que réaliste ; crachats, hurlements, coulissement de grilles, exclamations, poignardages, on s’y croirait.
Certaines cellules présentent des objets personnels très touchants, peintures, pipes, jeux d’échec, tricotages ( !), instruments de musique. Chacun ayant démarré son tour individuel séparément, les visiteurs se croisent et se recroisent à différents moments de l’histoire contée. C’est un joyeux bordel mais qui reste fluide. Et pas moyen de savoir en regardant le visage des autres ce qui va se passer ensuite. Les trois cellules des rares détenus ayant réussi à s’évader, ici grâce à la force de cuillères pour percer le mur et au savon pour fabriquer des têtes de mannequin, me touchent particulièrement. Ils ont donc réussi à s’échapper de la prison réputée la plus sûre du monde en son temps. Respect. Grand respect. Comme leurs corps n’ont jamais été retrouvés, la version officielle en déduit qu’ils ont dû se noyer. Mais non les gars, ils se la sont coulée douce dans un n’importe quel pays d’Amérique Latine ! Pourquoi ne pas reconnaître l’infaillibilité du système ? Note pour plus tard.


Entre phantasmes et réalités, paraît que la vie à Alcatraz aurait été un tout petit peu moins horrible que le veut la légende. Enfin, c’est ce que raconte la version enregistrée. Les repas n’étaient pas si mauvais, et les requins qui infestent la baie de San Francisco ne sont pas mangeurs d’hommes. N’empêche que la température de l’eau et les courants restent une réalité. Quant aux familles de gardiens qui vivaient là, elles étaient plutôt très contentes ; elles ont introduit nombre de plantes, les enfants jouaient en plein air, bénéficiaient d’une vue splendide et laissaient toujours leurs portes ouvertes. Femmes et enfants n’avaient aucun contact avec les détenus. Qui eux par contre pourrissaient dans leurs cellules infâmes en entendant parfois des rires s’échapper des nombreux bars et bordels de la rive non loin. “These five words seem written in fire on the walls of my cell: nothing can be worth this” George -Machine Gun- Kelly, inmate n°117. Mais la version officielle a préféré souligner les mots d’un autre ancien détenu expliquant que son expérience d’Alcatraz en a fait un homme meilleur. Formidable. Il devait avoir bénéficié d’une éducation, ou s’était peut-être converti en prison. Je suis injuste car probablement trop baignée par la culture romantique des loubards cinématographiques. Qu’est-ce qu’on en sait au final de ce qui s’est réellement passé sur The Rock ? Pas grand-chose, à part les films de Hollywood et le audio-tour officiel.

Attrape l’avant-dernier bateau pour San Francisco, retrouve Manuella à son bureau qui m’embarque sur son scooter pour un dîner en tête-à-tête à Castro, le quartier gay. Quel changement d’ambiance, et quel plaisir de voir se balader main dans la main des vieux aux cheveux grisonnants, des Teddy Bears piercés et sur-musclés, des obèses tatouées sur les avenues encadrées de drapeaux arc-en-ciel. On dîne à Harvey’s, le bar en hommage au politicien du même nom, en discutant des droits des homosexuel(le)s et de ce qu’Obama leur a promis et fait, ou pas.

Merci Hollywood pour nous avoir fait connaître tout ça, pour le meilleur et pour le pire.

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